Alice Laverty est artiste peintre plasticienne.
Retrouvez les dessins réalisés pendant la journée d'étude.
Alice Laverty est artiste peintre plasticienne.
Retrouvez les dessins réalisés pendant la journée d'étude.
Le dessin humoristique requiert un alliage habile entre la compétence graphique et la pertinence d’une idée. C’est à mes yeux une discipline extrêmement exigeante. Je dois faire appel à une forme d’intelligence particulière qui demande de synthétiser un propos tout en essayant le rendre drôle. C'est toujours risqué, car on n’est jamais drôle pour tout le monde… C’est pour moi une véritable gymnastique que j’adore, et qu’on ne pratique pas dans l’illustration ou la peinture, disciplines qui font appel à d’autres leviers de langage. En faisant tout cela, je goute tous les plaisirs de la représentation graphique.
A mes yeux, travailler aux côtés de Cartooning, c’est défendre, sur le terrain, auprès de citoyens que l’on entend ou voit peu (adolescents, jeunes des quartiers prioritaires, détenus) les valeurs de la République Française. Nous faisons un travail de pédagogie sur le dessin de presse et la liberté d’expression dans la République française. En tant que dessinatrice, ces ateliers me confrontent à un réel que je ne verrai jamais dans mon atelier. L’échange mutuel qui s’y produit est toujours très enrichissant et fortifie mes convictions : la liberté d’expression n’est pas incompatible avec le respect d’autrui, mais cela reste à expliquer. Et cette liberté est un bien cher qu’il nous faut défendre constamment car rien n’est acquis.
Les jeunes savent naviguer et utiliser ces outils incroyablement. C’est un élément dans lequel ils grandissent. En tant qu'artiste, j’ai l’impression que les supports numériques et tous les devices sont devenus des prothèses pour nous. Est-ce qu’une dépendance affective est à craindre ? En tant qu’artiste, je trouve qu’il n’y a rien de plus riche et inspirant que le réel. Le virtuel ne sera qu’une pale copie de la beauté du monde.
En ce qu'un dessin humoristique n’est pas docte, il est « modeste » plastiquement et intellectuellement percutant. Je pense que ces formes de langage permettent de dire les choses autrement. Un dessin humoristique ne remplace pas un essai théorique mais il permet de capter l’attention d’un esprit qui serait hermétique à la problématique en me faisant sourire.
Il me semble que les professionnels concernés (le corps enseignant au primaire et secondaire notamment) font leur maximum pour se saisir de ces nouveaux enjeux de démocratie, d’égalité, et d’accès à la connaissance tout en luttant contre d'éventuels dangers. En entendant les fruits de toutes les recherches exposées ce jour, je me demande seulement si les pouvoirs publics s’en saisissent suffisamment.
Propos recueillis par Mathilde Larrieu le 02/02/2022